Création de l'élevage

 L'élevage de Cormeilles est né d'une passion pour les chevaux que j'ai toujours eue.

Peut-être avais-je été cheval dans une vie antérieure? toujours est-il que lorsque mes copines jouaient à la poupée, je me construisais dans la cour de ma grand mère des parcours très compliqués fabriqués avec les tabourets de  cuisine surmontés de balais et de seaux que je sautais ! j'étais cheval ou plutôt jument olympique, je m'imaginais montée par Janou Lefèvre mon idole... j'avais 8 ans.

Quel bonheur quand ma mère m'offrait, le dimanche alors que mon père faisait son service militaire en Algérie, des tours de poneys au bois de Boulogne; je voulais toujours le plus grand, un pie; qui même parfois faisait quelques foulées au trot !

 Un peu plus tard,quand les copines commençaient à regarder les garçons, je m'étais constituée un haras ou plutôt un ranch avec des maquettes de chalets suisses étalées sur la moquette verte de ma chambre, inspirée par Marie OHARA et son herbe verte du WYOMING. Le cadeau divin que l'on pouvait me faire à l'époque était un nouveau petit cheval ou au mieux une écurie ou un morceau de paddok à construire. je jouais des heures m'inventant des scénarios complexes où les chevaux sauvaient les hommes au milieu d'une nature non polluée, déja écolo!

Il faut dire que, étant fille unique, mes parents voulant me préserver de ces grosses bêtes dangereuses, je n'ai pu approcher les chevaux que dans mes rêves sauf un été à Cabourg en 1960 où j'ai pu m'initier à la voltige.

A 16 ans, le bac en poche, en m'inscrivant en fac de médecine, j'ai vu que l'on pouvait pratiquer l'équitation dans un club de Joinville dans un manège sorti d'un film d'Yves Allégret, avec un moniteur comme il en existait il y a 40 ans, qui cherchait  à sélectionner les cavaliers sur leur tenacité!...

 Ayant  pu,enfin, approcher, sentir et toucher un cheval il m'en fallait plus pour me dégoûter!

J'ai donc passé mes degrés, traversant tout Paris en métro de Joinville le pont à Jasmin 2 fois par semaine.

Mes parents, mis devant le fait accompli, ne m'empéchèrent plus de continuer.

 A l'occasion des vacances dans la maison de famille de Normandie à Villers sur mer, j'ai pu faire des stages chez le colonel de Torcy qui a mis des générations à cheval sur ses trotteurs réformés inconfortables et impossibles à équilibrer au galop. Grâce à lui, je suis partie par la suite à Marrakech avec une lettre de recommandation pour son ancien bras droit lorsqu'il s'occupait des haras au Maroc. J'y ai passé les plus beaux mois de ma vie, découvrant le grand sud à cheval sur ces petits Barbes si résistants. C'est lui également qui m'a remis à cheval 2 semaines après mon accouchement; je n'ai eu le droit qu'à une seule faveur : monter à l'aide d'un tronc d'arbre et non  pas en sautant !! jamais de pied dans l'étrier....

 Maintenant, le seul et unique but de ma vie avoir un cheval, mais quel cheval?

Passage au poneys club de deauville où mon fils bientôt fut mis à cheval par georges Cotrait, je lui en parle; j'avais quelques économies  mises de côté tous les mois sur un plan d'épargne vie durant 10 ans "pour ne pas y toucher": réservé au "Cheval" et le défilé commença.....

Un ravissant petit étalon pur sang arabe me rappelant mes barbes marocains, il tiquait à l'ours et retourna dans son pré.Un trotteur noir joli comme un coeur mais non débourré et entier de surcroit...D'autres qui ne firent que passer et puis je partis en vacances.

Au retour, je sentis d'emblée que quelque chose m'attendait; des clins d'oeil, des sous entendus, l'excitation des plus jeunes qui étaient impatients de voir ma réaction en m'escortant jusqu'au boxe, le plus grand, mais aussi le plus sombre. Après être entrée, encore éblouie par la lumière extérieure, je cherchais une silhouette animée d'un mouvement, j'étais à l'écoute d'un souffle et je cherchais une présence en regardant vers le bas et c'est la que je vis une ombre mais pas à mon niveau , tout en haut. L'accomodation à l'obscurité se faisant progressivement, je découvris une énorme masse qui me regardait tout aussi étonnée que moi....RIVAL!

Sortant de mes petit Barbes et des doubles poneys, la transition fut radicale. Cette énorme bête mesurait plus d'1m 72 au garrot puisqu'il me dépassait et pesait autour de 800kg de muscle. Ce que j'ai appris plus tard, c'est qu'il venait à 6 ans d'être castré et qu'il était encore entier dans sa tête.

Que de souvenirs ensembles, je lui dois l'amour des selles français, il a été mon maitre d'école, m'a fait passé tous les échelons et m'a permis de participer aux cycles CSO de Normandie. Que de sensations! surtout quant je me faisais embarquer sur la plage de deauville le vendredi soir, après avoir roulé depuis paris après mon travail afin d'arriver avant le coucher du soleil; il le savait et il m'attendait. Que d'amour, on s'est donné, j'ai encore le souvenir tactile de son bout de nez en velours , doux à caresser et à embrasser. Je lui ai confié toutes mes peines et mes joies de femme et de mère, il les a écoutées  patiemment en me réconfortant de son oeil bienveillant.

Parallèlement, mes parents voulurent offrir à mon fils Alexandre un poneys.

Je retournais prendre conseil auprès du colonel de Torcy qui m'adressa à son collègue le colonel de Laurens, un des tout premiers à avoir importé en France des poneys connemaras. C'est ainsi qu'Argyl de beauchamps la propre soeur de carryl de beauchamps HN, vint rejoindre Rival .

Commencèrent les "années bonheur"

.au poneys club de deauville puis à l'Oxer de deauville pour la bande d'enfants et les parents cavaliers ; ceci merveilleusement raconté par Jérôme Garcin dans son livre "la chute de cheval".

Les enfants grandirent, les galops furent passés , puis ils devinrent adolescents et se firent tirer de plus en plus l'oreille pour m'accompagner les week ends.

Je rencontrais un cavalier et je partis m'installer à Bonneville la Louvet. Annina fut notre cadeau de mariage ... et  notre 1ère poulinière connémara.

Suivirent les "années de galère" ....

Galère dans mon travail: Pour rester plus souvent en Normandie j'ai fermé mon cabinet à paris et j'ai pris un travail de salariée dans un centre de soin qui ferma lui aussi quelques années après m'obligeant à courrir de vacation en vacation.

Galère dans ma vie sentimentale qui s'acheva par un divorce traumatisant dans tous les sens du terme....

Mon Rival  fut victime d'un accident sur un parcours de cross alors que je passais quelques jours à New-york; coup de téléphone du vétérinaire, fracture comminutive d'une phalange, que doit-on faire?, tout bien sur ! ; rien, n'y a fait. Au bout d'une semaine de souffrance, il s'est endormi dans mes bras......

Argyl, délaissée par mon fils, fit passer tous les 6 èmes galops aux élèves du Brévedent puis, devenue boiteuse me fut rendue , c'était en Juin, J'ai eu juste le temps de l'emmener au haras où stationnait Canal misty fion. Mon nouveau chouchou Merryl était en route.

Peine de coeur et peine d'argent, suite à mon divorce je cherchais un endroit rien qu'à moi  et à mes chevaux pour la vie où planter mon potager! 

A l'époque il me restait Argyl, Merryl et Naïade ses deux poulains, joyeuse B la jument de ma fille, Nymphéa la pouliche de Annina que mon ex mari avait gardé et Lolipop une petite jument achetée à la mort de Rival. 

2001, les" années transition ", je rencontre mon futur associé tout aussi frappading que moi avec les chevaux!  On achète ensembles Joyeuse B à 4 ans pleine de Hémir Platière. Je loue une petite maison sur Blangy le Chateau avec l'idée de trouver rapidement des terrains pour y mettre tous les chevaux et leur construire des boxes. 

2004, on me parle de terrains à vendre  sur Cormeilles avec un batiment agricole en ruine à restaurer.Le coup de foudre! Je m'endète pour 15 ans. Les chevaux d'abord, 4 grands boxes en dur seront construits, la maison sera bachée en attendant,et puis un jour, vision apocalyptique le terrassier avec son bull avait couché la maison en colombage pour faire une dalle en béton bien droite!.....Plus d'argent pour reconstruire à l'identique. J'achète un mobil-home des années 70, il restera sur la dalle pendant 3 ans jusqu'à ce que je vende mon appartement à Paris, les enfants ayant quitté leur nid.  3 années à crever de chaud en été et à grelotter en hiver sans eau, à casser la glace dans une poubelle placée devant la porte. De cette période, finalement il ne me reste que des bons souvenirs et je peux apprécier d'autant plus le fait d'avoir enfin ma maison.

Seule et isolée dans ma campagne, j'ai partagé ma solitude avec tout un tas de matous venus de nulle part et qui sont restés un bout de chemin avec moi: Tout d'abord, Gribouille mon chartreux qui restera avec moi jusqu'à ce que ma maison soit construite et puis il disparut un jour comme il était venu.

Lucie, tendre chatte rayée, appelée comme l'héroïne de "gouttière "ce merveilleux livre de Rémo Forlani. Elle m'a laissé une nombreuse descendance confiée pour la plupart à des amis. Sa fille Bagherra est toujours avec moi depuis 7 ans fidèle, m'attendant tous les Week-end, elle n'a jamais voulu rentrer dans la maison sauf pour voler à la sauvette le morceau de poulet qui par erreur trainait dans la cuisine. Sa soeur Lea et sa fille carotte vivent en chattes de luxe chez mes parents. Baghee me laisse tous les ans un chaton devant la porte, généralement un ravissant petit male, seule la couleur change; à moi de lui trouver gite et couverts !... Max est resté à la maison, c'est le chef des chats, gare aux matous qui approchent! et puis il y a boulette qui couine quand elle voit la boite de croquettes et plus récemment, la petite dernière Halloween noire comme une sorcière.

Les premiers "de cormeilles" naissent: Popeye, queenie et Rubis puis les 4 R Roméo, Rubis, Rambo et Roxane; shiva; Utopie et enfin Améthyste. Des joies, mais aussi des peines, la mort de Argyl et d'Annina, la perte de 2 poulains à la naissance dont celui de Saphir cette année.

La plupart des poulains sont partis, il ne reste plus que Rubis, Saphir et Toto au travail.

Au début, lorsque je pensais au moment où il faudrait me séparer de mes bébés, cela me semblait impossible à réaliser, j'avais l'impression de faire de l'esclavagisme à gagner de l'argent en vendant les chevaux que j'avais fait naitre , soigné, chouchouté, qui m'avaient fait confiance.

M'en séparer, sans savoir ce qu'ils allaient devenir, ne pas pouvoir assurer avec certitude leur futur bien-être m'était totalement insupportable.

Alors, quoi faire? tout arréter? j'y ai pensé, mais j'ai réfléchi. J'ai pensé à mes propres enfants que j'aime plus que tout au monde, à un certain moment, il faut couper le cordon, laisser chaque être accomplir ce pourquoi il est ici bas. Mes chevaux auront d'autres propriétaires, dans d'autres pays,c'est la vie!........

J'ai déja la chance de vivre une vrai passion et d'essayer de la mener le mieux possible , ce qui apporte son lot de joie comme en ce moment avec Saphir mais aussi d'angoisse quand on se retrouve seule face à des tâches trop dures à assumer physiquement, moralement et financièrement.